Commentaire composé : Le biographique

Mémoires d’outre-tombe, Chateaubriand.
Dernière page des Mémoires.
De « Grâce à l’exorbitance de mes années... » jusqu’à « …je descendrais hardiment le Crucifix à la main, dans l’Eternité »

Chateaubriand dit dès la 1ere ligne qu’il est dans la terminaison de ses mémoires. Il utilise la métaphore « monument » pour désigner ses mémoires. L’œuvre est gigantesque. Chateaubriand précise qu’il ne termine pas ses mémoires la veille de sa mort. Il voyait la mort approcher sans toutefois qu’elle vienne à lui. Mais maintenant elle n’est plus très loin. C’est pourquoi il décide d’arrêter d’écrire. Dans le 2e paragraphe il évoque le futur et le décrit même puis annonce ce qui va se passer. C’est un texte prospectif. Il est heureux de quitter ce monde. Dans cette page il évoque un temps d’orage, même temps que le jour où il est né. « le jour où ma mère m’infligea la vie ».


• Texte visionnaire :

2e paragraphe, Emploi de futurs. 7 verbes au futur de l’indicatif + emploi du futur d’avenir. Il a un regard prospectif sur la société et le monde. Ce sont des hypothèses. « Les scènes de demain ne me regardent plus. Elles appellent d’autre peintres : à vous messieurs. » Ainsi Chateaubriand a été le témoin de son temps et maintenant passe le témoin. Cette phrase sert de transition. On passe d’un récit historique et prophétique à un retour à lui.

- Une des marques de l’écriture lyrique :
- Abondance de métaphores : « des nuages nouveaux se formeront », on retrouve l’atmosphère de l’orage, souvent présente dans le livre. Ces orages représentes différentes émotions : Colère, passion etc. …
-Ce qu’il appelle le « champ de bataille » est pour lui le combat politique qu’il a mené.

>> Le champ lexical majeur est celui de la souffrance et de la difficulté :
- Vocabulaire du monde physique qui est déchaîné : « orage » ici au sens figuré, « calamités », « catastrophe »,
- Occurrence de la souffrance physique « champ de bataille », « blessure », « recrue », « pénible », « douleur ».
- Vocabulaire de la douleur morale : « afflictions », « malheurs »

Sous ses yeux le monde a connu des difficultés, des changements, des orages. Il est las de tout ce qu’il a apporté.

On retrouve aussi des expressions qui se rapportent à la religion : « stations pénibles » : « chemin de croix » qui renvoie à la crucifixion du Christ. Désigne quelque chose de pénible et douloureux. (C’est aussi une cérémonie qui commémore l’évènement initial, la naissance du Christ. On marche et on observe un arrêt devant des stations.) La vision que propose Chateaubriand ici serait amère et critique.

Lexique laudatif a la fin du texte, métaphores sur le levé du jour prochain, il annonce sa disparition, et celle de son monde aussi. Mais un jour nouveau va naître : « le 1er rayon doré de l’Orient. Orient = naître, se lever.
>>Champ lexical laudatif et de la lumière : « Orient », « nouveau », « commence », « reflets », « aurore », « soleil ».
Il explique que le futur ne s’annonce pas chaotique, mais qu’il naîtra sous l’ordre et la lumière. C’est un homme d’espérance et d’avenir.

• Ultime évocation de sa mort :
On est dans la dernière page d’une œuvre non pas parce que c’est le destin mais parce qu’il l’a décidé. Il y a un mot qui résume la violence de la mort : « la fausse », c’est l’image réaliste du trou, de l’ensevelissement, et de la désagrégation. « Le crucifix » est une image religieuse de la mort et de la souffrance. C’est aussi le témoignage de sa fidélité religieuse, portée jusqu’au bout.

Cette dernière page est une théâtralisation de sa mort, il compare sa propre existence a celle du monde.
Dualité dans le vocabulaire : Souffrance (lui) / Espoir (monde nouveau)
Mort (lui) / Lumière (monde nouveau)


• Eternité :

Ce mot clos le roman. « Orient », « Crucifix » et « Eternité » prennent des majuscules que le langage n’impose pas.
L’éternité, c’est l’au delà du temps, connotation religieuse. Il exprime aussi la victoire sur la mort. C’est une nouvelle occasion de dire la fidélité et la permanence de sa foi religieuse.

La première phrase de ce texte est très intéressante : « Grâce a l’exorbitance de mes années, mon monument est achevé ».
Exorbitance de mes années -> mort prochaine
Jeu culturel : « Mon monument est achevé » -> traduction mot à mot d’une célèbre phrase latine d’Horace : « exequi monumentum ».
Son œuvre est achevée, lui mourra, mais elle restera. Il est certain que par delà la mort il vivra grâce à son œuvre dans la mémoire de la postérité. C’est une survie à toute disparition.